LAFCADIO
Tante Sérénité
Papa je voudrais que tu me parles ce soir
Que tu me parles de celle que l’on tait
De celle que tu appelais ta bourgeoise parfois
Que maman appelait tante Sérénité
Nous, on croyait qu’elle avait pris la tangente
Mon frère l’imaginant tirant sa révérence
Je la voulais belle négresse, de ces femmes rebelles
Qui décousent les ors avec de vieilles ficelles
Papa , au ponton, On t’ a vu sur le soir
L’accompagnant au port, pour un ultime au revoir
Ayant certainement lu dans ses regards pressés
Qu’elle ne reviendrait sans doute jamais
Qu’elle doit émarger sa vie au coin d’ailleurs
Qu’elle doit se bouffer des louches de bonheur
Que le louche dans une famille comme la nôtre
C’est le canard boiteux, celui pas comme les autres
Grand père l’avait compris, dans son vieux grimoire
Elle faisait sa vie ailleurs tante Sérénité
Elle ne pouvait pas vivoter dans notre histoire
Ils butinent les coins de lune les déshérités
Papa, j’ai tout nié, voulant faire comme toi
En feignant d’ignorer celle qui nous plait
Les générations nouvelles veulent comme il se doit
Exhumer le passé mais pas les intérêts
Pas plus tard, mon fils me disait son espoir
De dégoter sans tarder ta frangine délurée
Qu’il ne voulait pas subir le désespoir
Des connivences glacées les sourires inquiets
Maman l’avait lu dans sa vieille passoire
Elle ferait sa vie ailleurs la déshérité
Jamais elle ne pataugerait dans nos baignoires
Elle a d’autres chats à fouetter La Sérénité